Herbicide, explosifs & créatine : quand les industriels allemands se lancent dans la défense
La journaliste Patricia Nilsson donne la parole à ces « dirigeants issus des territoires », dans une très bonne enquête pour le Financial Time.
©Axel Heimken/AFP/Getty Images
L’économie allemande connaît depuis 2023 sa plus longue récession depuis 1945.
En cause, une hausse exponentielle du prix de l’énergie depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie et la crise du secteur automobile, engendrée par la transition vers les modèles électrique et la concurrence chinoise, ultra-dominante dans ce secteur, qui s’en suit nécessairement.
C’est pourquoi les PME et les ETI industrielles du Mittelstand cherchent à adresser le marché de la défense.
D’autant plus dans un contexte où les pays européens se sentent pris en étau par des compétiteurs de plus en plus belliqueux et où la nécessité s’impose de plus en plus de se donner les moyens de “protéger nos démocraties”, pour reprendre le motto du concurrent allemand de l’Américain Palantir, Helsing.
L’enjeu crucial du volume de munitions fait en revanche intervenir des acteurs que l’hégémonie de la tech avaient relégués jusqu’ici très loin de la sphère médiatique et institutionnelle.
On observe ainsi une compétition inédite entre des PME et des ETI de province et des entreprises de cols blancs, pour lever des fonds auprès d’investisseurs sans doute plus habitués à investir dans le logiciel que dans les explosifs.
La journaliste Patricia Nilsson donne la parole à ces « dirigeants issus des territoires », dans une très bonne enquête pour le Financial Time.
Le patron d’Alzchem, une ETI dans la chimie, témoigne ainsi, narquois :
« Tout le monde étaient jusqu’ici obnubilés par les conflits cyber et la cyberguerre à venir, et personne n’avait anticipé que les munitions de 155 mm aux normes de l’OTAN seraient une des choses les plus recherchées dans un conflit aux portes de l’Europe. »
Son groupe investit 140 millions d’euros pour produire davantage de nitroguanidine :
« Jusqu’en 2022, l’un des principaux secteurs d’activité d’Alzchem consistait à fournir au secteur agricole de la nitroguanidine — un composant de base de nombreux herbicides destinés à améliorer les rendements agricoles, qui est aussi hautement explosif et peut servir de propulseur pour des obus à longue portée. »
Mais le groupe pari aussi sur tout un autre type de munition :
« Niedermaier a déclaré s’attendre à ce que la défense représente à l’avenir plus de 10 % du chiffre d’affaires d’Alzchem, selon les résultats de son autre pari stratégique : la créatine, un acide aminé favorisant la prise de masse musculaire, très prisé des influenceurs du fitness. »
De son côté, le fabricant de moteurs Deutz AG prévoit que La Défense représenta bientôt 2 % de ses 2 milliards d’euros de chiffre d’affaires.
Une enquête à lire ici :
https://www.ft.com/content/93576ba2-42b8-41d4-90a5-654598f5e268?accessToken=zwAGNMBTu8I4kdOTV2uiQrhB1NOQpWVFmPXiaA.MEUCIBSgrla8KIHGOuR8L2Edrkt-K73axQCe0Z-MNtl0pBRZAiEA-idpQmLAK7tqSpaLHfTgohl-9SORUldYaWzBG2HH7PY&sharetype=gift&token=2bd458c9-9d41-4f63-a15f-057fe3d69cdf